Aperçu historique

En cette aube du « Siècle de la chevalerie », la société féodale s’enracine et se fortifie pour donner ce qu’elle a de meilleur : le renouveau des lettres et des arts, les chefs-d’œuvre de l’architecture romane, la mise en culture des terres grâce au défrichement des forêts, la multiplication des châteaux, des bourgs et villages, la renaissance d’une vie urbaine, de l’artisanat et du commerce. Nobles, bourgeois, artisans et agriculteurs assurent l’essor de la vie économique.  L’Eglise, bien structurée autour de la papauté, dispense la vie religieuse, édifie les cathédrales, construit les hospices et hôpitaux, ouvre des écoles et des universités, multiplie les monastères comme autant de centres de rayonnement spirituel, artistique et intellectuel.

 Issu de l’arbre bénédictin, Cîteaux, grâce à la personnalité exceptionnelle de saint Bernard (1090-1153), originaire de  Bourgogne (il est né à Fontaine-Lès-Dijon), connaît un essor extraordinaire.

Funérailles de St Bernard (peinture de Lecco di Pietro v. 1400) musée de Dijon.

Clairvaux dont Bernard est abbé à la tête de sept cents moines, est à l’origine, en moins d’un siècle, de plus de cent fondations essaimant dans toute l’Europe, de  la Champagne jusqu’au lointain Portugal.

C’est aussi le temps des expéditions lointaines et de la Croisade que Saint Bernard prêche à Vézelay, entrainant les foules vers la terre sainte. Jérusalem a été prise en 1099. Il s’agit de consolider ces nouveaux territoires et d’assurer la sécurité des pèlerins qui affluent en masse.

Combat de chevaliers en Terre Sainte (fin du XIIe siècle) et sceau Templier

  

Un chevalier croisé, Hugues de  Payns (originaire de Champagne), décide avec huit autres compagnons de fonder, autour du saint sépulcre la milice des pauvres chevaliers du Christ à vocation religieuse et militaire.

Bernard de Clairvaux s’enthousiasme pour l’ordre naissant qui prend le nom de Templier. Il contribue à rédiger leur règle, écrit un panégyrique du nouvel ordre (de nove laudae militiae) et fait approuver les statuts des Templiers par le concile de Troyes (1128).

Le "Dôme du Rocher", bâti sur l'emplacement de l'ancien Temple de Salomon, fut cédé aux Templiers qui en firent leur premier établissement en 1128 à Jérusalem et sceau Templier

  

En quelques années les chevaliers à la croix écarlate et au blanc manteau recrutent dix milles hommes issus de la meilleure noblesse de Bourgogne, de Champagne et du Royaume de France. Des centaines de maisons et commanderies voient le jour en Palestine, à Chypre, en Grèce, en Italie, en France, en Angleterre, en Hongrie, en Espagne, au Portugal.

Choeur de l'église du Temple de Londres (XIIIe siècle) et chapelle Templière octogonale de Laon (XIIe siècle)  

La Bourgogne, duché et comté, prend place parmi les provinces les plus importantes. Tout en menant une vie monastique, les Templiers sont de tous les combats au Proche Orient contre les Sarrasins et participent à la Reconquista de l’Espagne sur les Maures. En Europe, ils exploitent de vastes domaines agricoles, reçoivent en héritage de nombreuses donations, érigent des forteresses, bâtissent des ponts ou des églises, construisent des routes, deviennent armateurs de vaisseaux, prospèrent par des activités de commerce et de banque. Bref, le Temple accède au rang de puissance internationale qui ne dépend que du pape. D’où bien des convoitises, des jalousies, des complots.

Philippe le Bel, roi de France, n’est pas le dernier à vouloir s’emparer des richesses du Temple, dont le siège est à Paris. Il prépare soigneusement son affaire avec la complicité d’un pape docile et faible, Clément V. Le 13 octobre 1307 tous les Templiers du Royaume sont arrêtés en même temps, incarcérés, soumis à la torture  et aux interrogatoires, jugés et condamnés.

L'arrestation des Templiers (1^er octobre 1307) (Chroniques de Saint-Denis).

Leurs biens sont saisis, leur fortune confisquée, l’Ordre, sous les accusations d’hérésie et de sacrilège, est aboli par un pape complice. Le dernier Grand Maître du Temple, Jacques de Molay (originaire du Jura) meurt sur le bûcher à Paris le 22 décembre 1313 en criant haut et fort l’innocence de l’Ordre, proclamant les accusations mensongères.

Le bûcher des Templiers (Paris, 1313).

Non coupable, le Temple n’en est pas moins supprimé dans toute l’Europe. Ironie de l’Histoire, Louis XVI, dernier des capétiens, descendant de Philippe le Bel, sera enfermé dans le donjon du Temple de Paris avant de monter sur l’échafaud en 1793.