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1 juillet 2014 2 01 /07 /juillet /2014 11:53

Cinquième Grand Maître de l’ordre du Temple, André de Montbard succéda à Bernard de Tremolay (1152-1153) dont la maîtrise fut brève puisqu’il fut mortellement blessé lors du siège de la forteresse arabe d’Ascalon, aux portes de l’Egypte, le 16 août 1153. Il était lui-même originaire de la Comté de Bourgogne (aujourd’hui Franche Comté) tandis que son successeur, seigneur de Montbard, était issu d’une famille noble du duché.

 

13.jpgAndré fut reçu très jeune dans la Militia Dei (il était né en 1102 ou 1103) alors que Hugues de Payns, originaire de Champagne, avait créé la milice des pauvres chevaliers du Christ et du Temple de Jérusalem en 1119. Parmi les neuf compagnons qui le rejoignirent figuraient ainsi André de Montbard, simple écuyer en 1119, aux côtés de Godefroy de Saint Omer, des frères Gondemar, Roland, Payen de Montdidier, Geoffroy Bisot et Archambaud de Saint Amand. Baudouin III était alors roi de Jérusalem.

 

La famille des sirs de Montbard était apparenté à celle de Bernard des Fontaines (futur Saint Bernard), ayant pour mère Aleth de Montbard*. On connaît la prodigieuse destinée de Bernard, fondateur de l’abbaye de Clairvaux, natif de Fontaine-les-Dijon, entré comme moine à Cîteaux (Côte d’Or) en 1112. La ville de Montbard relevait alors des comtes de Bar (Mons Barri) d’où proviennent les bars (poissons) d’argent figurant aujourd’hui encore dans les armoiries de la cité.

 

Bernard, sir de Montbard, eut quatre enfants (trois garçons et une fille) parmi lesquels Milon qui entra tout jeune dans l’ordre cistercien avant de fonder, selon la tradition, l’abbaye de Fontenay.

Gaudry, autre fils de Bernard, seigneur du château de Touillon** quitta le siècle pour revêtir lui aussi l’habit monastique, entraîné par son bouillant neveu Bernard des Fontaines à la suite de son veuvage. Parents, alliés et amis du futur saint, au nombre d’une vingtaine, rejoignirent bientôt l’ordre cistercien.

 

14.jpgLes alliances de famille apparaissent dès le XIIème siècle comme déterminantes et caractéristiques de ce qu’on nommerait aujourd’hui des « fratries » ou des « clans ». Elles caractérisent aussi bien l’ordre cistercien que celui du Temple, au moins à leurs débuts.

Mais revenons-en à André de Montbard. L’âge minimum pour être armé chevalier au XIIème siècle était de 18 ans mais l’on pouvait être fait écuyer dès l’âge de 16 ans ou parfois plus jeune encore. C’est ainsi qu’André devint écuyer en 1119 au sein de l’ordre du Temple avant d’être fait chevalier en 1125 à l’âge de 23 ou 24 ans*** ce qui lui valut de participer au concile de Troyes (1129) qui entérina la création de 1119 par l’Eglise et sous l’autorité du pape.

 

Sa « carrière » si l’on peut dire, est basée sur sa valeur personnelle, sa bravoure et son intelligence. En 1139, il fait partie de la délégation qui se rend auprès d’Innocent III en vue de faire reconnaître la mission du Temple au sein de la croisade. Cette confirmation est accordée sans difficulté par le pape. C’est l’occasion pour l’oncle de renouer avec son neveu Bernard, abbé de Clairvaux. Pourtant, l’aide militaire promise en l’occurrence ne devait être effective que sept ans plus tard, sous le pontificat d’Eugène III, à la demande pressante du roi de Jérusalem qui sentait ses états menacés.

 

15.jpgDans l’intervalle, la veuve de Foulques, Melisende avait assuré la régence du royaume latin d’Orient, recevant en la circonstance le soutien et les encouragements de Saint Bernard qui lui écrit ces lignes en 1153 : « André, notre cher oncle, en qui nous avons toute confiance, nous a donné, dans ses lettres, de meilleures nouvelles : il nous dit que vous vivez dans la paix et la mansuétude, que vous vous conduisez avec prudence, que, suivant les conseils des sages, vous aimez les frères du Temple et que vous les traitez comme vos familiers… » 1153 : C’est l’année même où André de Montbard accède à la maîtrise. Auparavant, André a gravi les échelons de la hiérarchie templière, devenant en 1148 sénéchal, fonction très importante puisqu’elle fait de lui le gardien des finances et des biens de l’Ordre****. Le sénéchal est, pour ainsi dire le bras droit du Grand Maître à égalité de rang avec les commandeurs des différentes provinces (sept en 1150, à savoir : France, Angleterre, Poitou, Espagne, Allemagne, Italie outre la province Chef d’ordre de Jérusalem et Terre Sainte).

 

En 1150 le Temple aligne au Proche Orient une force militaire considérable de 400 à 500 chevaliers et presque deux milles sergents et hommes d’arme répartis dans ses garnisons, forteresses et châteaux. A la même époque en Espagne et au Portugal, les Templiers représentent parmi les troupes engagées dans la « Reconquista » entreprise contre les maures, un effectif d’environ mille combattants. Le sénéchal doit simultanément assurer le ravitaillement et l’approvisionnement des « hommes du Temple », tâche lourde en temps de Guerre. Le Grand Maître Bernard de Tremolay trouve en son sénéchal un appui sûr alors qu’ont lieu des affrontements décisifs après l’échec des croisés contre Damas. Le prince d’Antioche, Raymond de Poitier vient de trouver la mort avec la « fleur de la chevalerie » au cours de la bataille de Fons-Murez (29 juin 1149). Il s’agit de « combler les vides » et de tenir bon face aux bandes armées de Nûr-Al-Din***** alors que la forteresse templière de Baghras a été emportée. André de Montbard pousse un cri d’alarme et s’efforce de rassembler tous les hommes en état de porter les armes, au sein du « couvent ». Il faut alerter le pape, le roi de France, les gens d’Eglise, les seigneurs et les barons. L’infatigable Suger, abbé de Saint Denis, appuyé par l’abbé de Clairvaux et celui de Cluny, alerté par le Grand Maître, « mobilise » pour réunir des troupes et entreprend une nouvelle croisade dont Saintt Bernard est nommé le chef (concile de Chartres du 7 mai 1150).

 

Sur ces entrefaites, l’abbé Suger meurt au moment du départ, le 13 janvier 1151. Intrépide, Bernard « reprend le flambeau » de la croisade. On peut ainsi lire dans une de ses missives adressées à son oncle : « La lettre que vous m’avait envoyée tout récemment m’a trouvé couché dans mon lit. Je l’ai accueillie, les mains tendues, je l’ai lue et relue avidement, mais je souhaite encore plus ardemment vous revoir. J’y trouve votre âme partagée entre le même désir de me voir et la crainte pour le danger de la Terre que le seigneur a honorée de sa présence… Que puis-je vous dire ? Je brûle de vous voir et je crains de vous voir venir…Que choisir ? Je ne sais. Satisfaire à la fois votre désir et le mien ou bien ajouter foi à la solide réputation que vous vous êtes acquise : on vous proclame tellement indispensable à la Terre Sainte qu’on la croit menacée d’un grave désastre si vous vous absentez. Aussi bien, je n’ose pas vous faire venir, mais comme j’aimerais vous voir avant de mourir ! » Bernard termine en donnant ses salutations au Grand Maître et à ses frères : « Magistrum et fratres vestros omnes de Templo… per te in Domino salutamus ». André de Montbard n’est pas encore Grand Maître à cette date mais son rôle majeur dans l’Ordre est souligné par les propos de Saint Bernard.

 

Le sénéchal ne pouvait ni ne devait abandonner son poste dans un instant aussi critique. Bernard de Clairvaux a toute extrémité, devait mourir le 20 août 1153, peu avant l’élection de son oncle par le chapitre général du Temple juste au moment où les croisés venaient de s’emparer d’Ascalon (22 aout) ******.

 

Le chroniqueur Geoffroy salue et reconnaît en André de Montbard, nouveau Grand Maître, « la grande colonne du Temple de Jérusalem », reprenant les termes même utilisés par Saint Bernard dans une de ses lettres à son propos. L’un des rares documents à nous être parvenu mentionnant la maîtrise d’André de Montbard est un acte de Baudouin III, roi de Jérusalem, en date du 27 mai 1155 qui mentionne un échange fait avec les chanoines du Saint Sépulcre. Ce document, et plusieurs autres ultérieurs, sont signés : André de Montbard (en latin : Andreas de Monte Barro, templi militiae magister).

 

André de Montbard serait mort le 17 janvier 1156 dans des circonstances restées obscures*******. Telle fut le cas exemplaire d’un Grand Maître du Temple, mort, selon toute vraisemblance, les armes à la main en Palestine lors d’une confrontation avec les sarrasins.

 

Arnaldus

 

*Née au château de Montbard, aujourd’hui circonscrit dans le parc Buffon où une plaque a été posée à sa mémoire sur une des tours entourant l’ancien donjon.

** Le dit Gaudry était un proche parent de Guy de Touillon, beau frère, selon toute vraisemblance de Hugues de Payns, fondateur des Templiers.

***Date confirmée par les travaux de Don Patrice Cousin (moine de la Pierre qui Vire). Cf. « l’ordre des Templiers et Saint Bernard in Mélanges Saint Bernard, Dijon, 1953.

****C’est au chapitre de Paris (27 avril 1147) que le pape Eugène III, en présence du Maître de France Evrard des Bars, concéda aux Templiers le droit de porter la croix pattée rouge sur leurs manteaux blancs et leurs armes.

*****En 1152 le Temple a reçu en donation la ville portuaire de Tortose (Syrie) où il bâtit une importante forteresse.

******Le Grand Maître précédent Evrard des Bars, en proie à un différend avec le roi de Jérusalem Baudouin III avait résigné ses fonctions fin 1152, pour entrer comme moine à Cîteaux. Son successeur, Bernard de Tremolay, eut une maîtrise très brève (quelques mois jusqu’à sa mort au cours du siège d’Ascalon).

*******La date de son décès est mentionnée dans le martyrologe de l’évêché de Langres, ce qui semble bien indiquer qu’il est mort « en versant son sang » comme Miles christie. Par ailleurs le sanctoral cistercien le place au rang des bienheureux et fixe sa fête au 12 octobre.

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